Hommes, Femmes : égaux face au cancer ?

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Le cancer a été la cause de mortalité de plus de 150 000 personnes en 2018. Face à la maladie, hommes et femmes ne sont pas égaux, à la fois dans la probabilité d’apparition d’un cancer, que dans le risque de mourir. Grâce à de nombreux organismes tel l’observatoire du cancer, on connait de mieux en mieux l’influence du sexe et du genre, avec d’un côté la biologie et de l’autre le social. L’inégalité hommes femmes existant dans la vie quotidienne se retrouve donc même dans le cancer : pourquoi et quelle prise en charge envisager ?

Des inégalités face au cancer liées au sexe

Pour chaque cas de cancer, l’atlas de la mortalité publié par l’INSERM permet d’objectiver une différence entre les deux sexes : 54 % des cancers annuels se développeraient ainsi chez l’homme. L’Institut Curie notamment s’est spécialisé dans l’étude des data, pour une médecine augmentée https://curie.fr/dossier-pedagogique/contre-le-cancer-la-puissance-des-data et une meilleure compréhension de ces différences.

Les principaux cancers de l’homme

Chez l’homme, les cancers les plus fréquents sont dans l’ordre le cancer de la prostate (50 000 nouveaux cas en 2015), le cancer du poumon et le cancer colo-rectal.

Le cancer prostatique en soi représente ainsi 25 % de l’ensemble des cancers masculins : il est évidemment spécifique.

En matière de différences de sexe, le cancer du poumon reste aussi plus fréquent chez l’homme (31 000 nouveaux cas en 2018, contre 15 000 chez la femme), ainsi que le cancer colorectal (23 000 nouveaux cas chez l’homme en 2018 contre 20 000 chez la femme).

Les principaux cancers de la femme

Chez la femme, le cancer du sein arrive en premier (58 000 nouveaux cas en 2018), suivi des cancers du poumon et colorectal.

Les cancers du sein à eux seuls représentent environ 1/3 des cancers présentés par la population féminine.

Bien évidemment, les cancers gynécologiques (cancers de l’utérus, cancers du sein, cancer des ovaires…) sont spécifiquement féminins, avec la plupart du temps un aspect hormono-dépendant.

Mais d’autres tumeurs peuvent être influencées par un métabolisme propre. Ainsi, le cancer du poumon chez la femme a été particulièrement étudié : on observe en effet depuis quelques années une baisse de la mortalité chez les hommes, alors que le sexe féminin est de plus en plus atteint. Certes, cela s’explique en premier par des changements de comportements, avec des femmes fumant de plus en plus et commençant aussi de plus en plus tôt.

Mais il a été aussi prouvé que les hormones, naturelles ou de substitution (contraception) augmentaient en plus le risque de développer un cancer du poumon. Il en est de même de certains mécanismes de réparations cellulaires, spécifiques à la femme.

La différence entre genre et sexe masculin / féminin est donc parfois complexe, combinant des facteurs biologiques et sociaux. D’où un besoin permanent de recherche.

Des inégalités de genre homme femme face au cancer

Responsable de la mission « société et politiques de santé » au sein de la Ligue nationale contre le cancer, Emmanuel Jammes conduit de nombreuses études pour mieux comprendre les conséquences sociales et sociétales du cancer. Lui et d’autres visent à mieux expliquer pour faire avancer la société.

Une exposition inégale aux facteurs de risques

L’émancipation de la femme ces dernières années constitue bien évidemment un point très favorable. Mais en parallèle, certaines ont adopté des comportements à risques comme le tabagisme ou l’alcool. Il y a donc eu clairement un changement de facteur de risque.

De la même manière, l’investissement dans de nouvelles activités professionnelles a pu conduire à de nouveaux risques sanitaires.

En revanche, à pathologie égale, on constate souvent un meilleur taux de survie chez la femme : cela peut s’expliquer par une culture du dépistage accru, en particulier à travers le suivi gynécologique. Mais aussi peut-être par une plus grande acceptation de l’observance des traitements ou du changement en matière de conduites à risques.

Car si la soumission est généralement une mauvaise chose, faire confiance et obéir à une équipe médicale s’avère positif pour lutter contre le cancer : ce schéma social où la femme est trop souvent sous les ordres s’avère alors un bénéfice en matière de santé.

La lutte contre le cancer, des différences de prise en charge

De manière générale, on met en évidence un taux de survie chez les hommes plus bas que celui des femmes, pas seulement face au cancer du poumon mais tout type de cancer.

La première raison est en partie biologique : les cancers de bon pronostic constituent 52 % des cancers chez la femme, contre à peine 28 % chez l’homme. Inversement, les cancers de mauvais pronostic représentent 40 % des cancers chez l’homme et 16 % chez la femme. Notons toutefois que la prévention, plus marquée chez la femme, joue évidemment aussi un rôle sur ce facteur pronostic.

La seconde raison est purement sociale : beaucoup de femmes acceptent de consacrer plus de temps à leur traitement. Donnant la vie, la femme s’inscrit en effet psychiquement dans une notion de survie. Inversement, certains hommes acceptent mal la notion de faiblesse associée à la maladie, et essayent de retarder l’issue des traitements lourds. Sauf que le cancer n’a rien à voir avec la virilité.

Les conséquences différentes selon les deux sexes

Les séquelles du cancer qu'elles soient intimes, sociales ou professionnelles, sont-elles aussi différentes selon le genre.

La pathologie, ou les traitements du cancer, altèrent souvent profondément l’enveloppe corporelle, et donc la représentation de la féminité ou de la masculinité.

C’est dire que le regard social sera très différent d’un malade à un autre.

Si la chimiothérapie rend un homme chauve, il pourra s’afficher sans soucis, avec même une image de virilité renforcée : le crâne rasé réifie la force masculine. Dans la même situation, une femme ne peut encaisser le regard de la société : elle doit se diriger vers une prothèse capillaire, avec l’impression de se masquer au regard des autres, de se cacher, de se mentir.

C’est le même mécanisme qui intervient à tous les échelons de la société, au travail, en famille ou dans le couple.

Car un autre problème peut altérer gravement l’égalité entre les deux sexes : tout ce qui touche à la sexualité ou à la fécondité.

S’il est vrai qu’un cancer de la prostate peut avoir de graves répercussions sur la sexualité ou la libido, la femme est peut-être la plus fréquemment atteinte : les troubles fonctionnels viennent parfois s’ajouter à une atteinte morphologique, extrêmement traumatisante par exemple dans un cancer du sein avec mammectomie.

La femme atteinte d’un cancer renvoie alors l’image physique et visible d’un individu altéré dans sa féminité, son intégrité et son identité.

 

Si ces inégalités femmes/hommes persistent donc encore en matière de cancer, les équipes médicales s’emploient à les combattre, pour une meilleure prise en charge préventive et thérapeutique. Le travail de nombreuses associations tel que l' institut national du cancer ou d’observatoires indépendants, permet aussi de mieux comprendre les conséquences sociales et sociétales, que la loi ou les comportements de chacun comment à réguler le mieux possible. Jusqu’à l’égalité complète des malades du cancer ?

Hommes, Femmes : égaux face au cancer ?