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Malgré les séquelles, une identité à réinventer, je suis là, debout, déterminée à me reconstruire, à me dépasser, à suivre mes rêves, et finalement m’aimer.

Mélanie Hannouche nous partage son histoire

Comment as-tu vécu cette traversée du cancer ?

Je suis Mélanie, 41 ans. J’ai un cancer du sein de type HER2 diagnostiqué en mai 2019.

Suite à un burnout en 2017, après près de 15 ans dans une banque, j’ai quitté mon poste de responsable rémunérations et j’ai repris des études de décoration d’intérieur en septembre 2018. Fraichement diplômée en mars 2019, j’étais sur le point de créer mon entreprise lorsque j’ai découvert par hasard, en prenant ma douche, une boule dans mon sein gauche. L’univers s’est alors écroulé sous mes pieds, car j’ai vite compris que ma vie allait basculer. Les examens médicaux (mammographie, échographie, irm et biopsie) se sont vite enchainés, ne faisant que confirmer mes craintes. Après une attente de 10 jours qui m’a semblé interminable, ma gynécologue m’envoie un simple mail : « Chère Mélanie, je reçois ce jour les résultats de ta biopsie qui montre la présence de cellules irrégulières. Une intervention est nécessaire. As-tu choisi un chirurgien ? » Pas un appel, pas une explication.

Une fois les résultats de la biopsie entre les mains, je découvre le jargon « carcinome infiltrant » et je découvre seule que j’ai un cancer, affectée par le manque d’explication et d’accompagnement. Je prends alors rendez-vous à l’institut Curie, où je prends une 2e gifle : le traitement nécessite 5 mois de chimiothérapie, une mastectomie totale, de la radiothérapie et des injections d’herceptin pendant presque 1 an.

La colère et la tristesse m’envahissent. Pourquoi moi ? pourquoi maintenant ? l’année de mes 40 ans, l’année de ma création d’entreprise, de mes 10 ans de mariage.

C’est au moment d’aller choisir ma perruque et mes turbans, juste avant la pose de mon cathéter, alors que j’étais terrifiée par tout ce qui m’attendait, que mes 1eres appréhensions se sont envolées. J’ai reçu pleins de conseils et astuces pour faire face aux effets secondaires et je me suis sentie armée et prête à affronter, voir à accepter l’inacceptable.

J’ai choisi de raser mes cheveux 15 jours après ma 1ere injection de chimiothérapie. Je ne voulais pas voir mes cheveux tomber dans la baignoire ou sur l’oreiller alors j’ai pris les choses en main.

Et paradoxalement, je me suis sentie fière, forte et courageuse, presque pour la première fois de ma vie. Ma devise : ne pas subir. Être actrice de sa guérison.

Plus de 5 ans de traitement finalement. Un protocole qui fait d’abord très peur, qui glace le sang puis dans mon cas, il m’a permis de me découvrir des ressources cachées, de faire un travail sur moi et d’aller au-delà de mes peurs, d’oser, d’exprimer mes ressentis.

Depuis le début, j’ai tenu à rester féminine et j’ai accessoirisé mes tenues, ma tête avec frange et turban, je me suis maquillée. Ma féminité réinventée a été ma principale arme dans l’estime de moi. Je me suis parfois surprise à me trouver plus jolie qu’avant. Certainement parce que j’osais enfin exprimer ma créativité et ma personnalité.

Tout cela m’a permis d’aller à la rencontre de nouvelles personnes, de saisir des opportunités de projets artistiques et photographiques qui correspondaient à mes envies du moment. 

J’ai aussi eu le sentiment d’être une équilibriste avec des moments très sombres et des moments lumineux, des moments où l’on croit chuter et des moments de grâce.

Quel soutien as-tu reçu pendant ta prise en charge médicale ?

J’ai eu la chance de recevoir énormément de soutien et de bienveillance de ma famille, de mes amis, de l’école de mes filles (corps enseignant, parents).

Oser demander de l’aide n’est pas donné à tous, moi la 1ere. Admettre sa vulnérabilité est difficile. Comme elle est visible pendant les traitements lourds, l’aide vient spontanément. Quand ce n’est pas ou plus visible, c’est à nous d’oser aller la chercher.

J’ai choisi également d’exposer mon parcours sur les réseaux sociaux et partager mon expérience sur mon blog. Je me suis vite sentie soutenue, épaulée, parfois remerciée par une communauté de femmes vivant les mêmes épreuves et cela donne une force incroyable.

Lors de mon parcours de soin, l’infirmière, avant le début des traitements, m’a informé sur la meilleure façon de se faire accompagner par les associations autour de l’hopital et dans ma région. Et puis j’ai assisté aux journées portes ouvertes de l’AFSOS (Association Française des Soins Oncologiques de Support) au sein de l’hôpital.

J’ai la chance de vivre en région parisienne et d’avoir des associations proches de chez moi qui proposent diverses activités : socio-esthétique, yoga, sophrologie, automassages, nutrition, art thérapie… entre autres.

Ces soins de support et ces associations sont essentiels dans mon parcours. Cela m’aide énormément à gérer le stress, ma féminité, ma condition physique et à faire de très belles rencontres humaines qui auraient été tout simplement impossibles avant.

On dit du cancer qu’il fait partie des maladies chroniques. Comment perçois-tu cela ?

J’ai mis du temps à accepter que j’étais malade. Car je ne sentais rien dans mon corps, aucune douleur. Je me remettais doucement de mon burnout. J’avais repris le sport et changé mon alimentation. J’étais en forme. Puis les traitements m’ont rendu malade et m’ont fait prendre conscience de la maladie. Et j’ai entamé un travail sur les messages que mon corps m’envoyait. Le MAL a dit. Burnout, cancer, ce n’est pas anodin et j’ai négligé beaucoup d’alertes.

Oui je pense qu’on vit avec le cancer pendant pas mal de temps, donc il est chronique : d’abord le temps des traitements lourds, il prend toute la place. Puis le temps de la reconstruction physique et psychologique (je suis encore à cette étape), de l’annonce de la rémission puis le temps de la surveillance médicale, des 5 à 10 ans d’hormonothérapie pour celles qui en ont. C’est un temps long. C’est aussi chronophage, tout prend du temps. 

Parviens-tu malgré tout à te considérer comme une ancienne malade ?

Le mot rémission n’a pas encore été prononcé par mon équipe médicale pour le moment. Alors non, je ne me considère pas comme une ancienne malade. Je suis encore en cheminement. Le corps va mieux, la tumeur a été retirée, les prises de sang sont bonnes, les examens sont au vert. Mais l’hormonothérapie est handicapante au quotidien pour le corps, la chimiothérapie laisse des traces sur le fonctionnement de notre cerveau, la prise de conscience de notre finitude est traumatisante. Difficile dans ces conditions de se considérer comme une ancienne malade. Et la santé est devenue ma priorité numéro 1. 

La prise en charge des patients et anciens patients grâce notamment aux soins de support te semble-t-elle essentielle ?

Absolument nécessaire ! on ne guérit pas le corps sans guérir l’âme et l’esprit. Ces soins de support et une approche holistique de la maladie sont pour moi des enjeux de demain. Ne soignons pas que les symptômes. Soignons notre équilibre, notre être dans sa globalité.

As-tu repris le travail ? Si oui, comment vis-tu cette reprise ? Si non, pourquoi ?

Non, je n’ai pas encore repris le travail. Comme évoqué plus haut, je ne suis plus salariée. J’étais sur le point de créer mon entreprise de décoration d’intérieur quand la maladie s’est déclarée. Ces mois de soin m’ont fait découvrir d’autres univers, rencontrer de nouvelles personnes, réfléchir à de nouvelles perspectives.

J’ai décidé de me faire coacher professionnellement pour travailler sur mes besoins, mes peurs, mes envies, mettre au clair mes idées pour préparer mon retour à l’emploi en 2021.

Comment tournes-tu la page aujourd’hui ? Comment te réinventes-tu ?

La page n’est pas encore tournée. Je suis encore en train d’écrire des chapitres de cette histoire.

Ce qui m’a aidé quasi immédiatement : réinventer ma féminité et l’assumer beaucoup plus. Je me suis beaucoup réinventée via mon look, mes turbans, les couleurs. Et le fait de partager tout cela avec d’autres femmes m’a mise dans la lumière. Et j’ai adoré cela. C’est quelque chose de je n’assumais pas du tout avant.

Ce que j’ai changé depuis : apprendre à me connaitre, à travailler sur mes émotions, à écouter mes ressentis, à introduire la notion de joie et de plaisir dans ce que je fais, à me faire du bien, tempérer mon hyperactivité au profit de mon intériorité.

Qu’est-ce qui te plaît chez Skin ?

Skin nous permet d’exprimer nos émotions à travers l’art, d’être plus à notre écoute, de réactiver la joie. J’ai participé à des expositions, j’ai expérimenté la kinésiologie. Skin nous offre de nombreuses possibilités d’ateliers et de moyen d’expression à expérimenter : le théatre, le chant, la poterie, la cuisine, la photo….

En tant que passionnée d’art, d’architecture, de décoration, de dessin, de mode, je suis plus difficile à canaliser lors de la création d’une œuvre artistique en binôme. J’aimerais tout faire et tout tester, sans vraiment de limites.  Un jour viendra !

Quelle est ta définition de la résilience ?  

La reconstruction physique et psychologique reste mon objectif de chaque jour. 

J’ai décidé d’être active, de ne pas subir les épreuves.

Je me suis promis de trouver des solutions, de faire les ajustements nécessaires pour ne plus rechuter.

J’ai pris la responsabilité de mon bonheur, j’ai décidé de vivre dans l’instant présent, et de suivre beaucoup plus mon intuition et mon cœur plutôt que mon mental.

Malgré les séquelles, une identité à réinventer, je suis là, debout, déterminée à me reconstruire, à me dépasser, à suivre mes rêves, et finalement m’aimer. 

J’ai la tête pleine de projets autour de ce qui m’anime, de ce qui m’a aidé pendant cette dernière année de traitement. J’ai envie de me former à l’art thérapie, au feng shui, à la psychologie positive, aux neurosciences, au reiki, à l’ayurveda…. Tellement soif d’apprendre.

Voilà ma résilience.

Et celle de la créativité ? 

Pour moi, la créativité n’est pas forcément artistique. C’est plutôt l’ingéniosité avec laquelle on traverse les épreuves et on apprend de ses expériences.

J’espère de tout cœur que ma créativité sera très vite au service de ma résilience.

J’aimerais transformer tout ce qui m’est arrivé, tous mes apprentissages, toutes mes compétences et en faire mon métier. A moi de l’inventer.

Mélanie Hannouche nous partage son histoire